Par Claudia Cataldi
Peu d’artistes parviennent à traverser les décennies avec la même force, la même fraîcheur et la même intensité. Rosana Penna fait partie de ces rares exceptions. Actrice, productrice et véritable passionnée de la scène, elle a construit une carrière marquée par la polyvalence, la rigueur artistique et une capacité unique à se réinventer. À dix ans déjà, elle étudiait le chant lyrique, et depuis, son parcours s’est entrelacé à des feuilletons mémorables, à des films, à des comédies musicales et à des pièces qui ont consolidé son nom comme l’une des interprètes les plus complètes du pays. Aujourd’hui, elle se réinvente une fois de plus en incarnant Juno, la maîtresse de l’au-delà, dans la version brésilienne du phénomène de Broadway Beetlejuice.
Rosana prête vie à un personnage qui, dans l’univers du spectacle, est rigide, autoritaire et grossière, mais qui parvient aussi à arracher des rires grâce à son excentricité. « Depuis le début, mon approche a été influencée par le merveilleux travail de ma chère collègue Sylvia Massari, qui avait interprété ce rôle dans la première version du spectacle. Mais, après la première, j’ai commencé à modeler ma propre interprétation, en insistant sur sa méchanceté, l’une de ses marques les plus fortes, sans négliger l’humour perturbé de sa relation avec Beetlejuice. Jouer les méchantes est toujours un cadeau pour tout acteur », affirme-t-elle.
Le défi fut encore plus grand : remplacer Sylvia Massari à São Paulo avec très peu de temps de préparation. Entre partitions, vidéos de répétition et rythme effréné, Rosana a dû trouver sa voix pour Juno — au sens propre. « Le plus grand défi a été de trouver un ton de voix qui ne blesse pas mes cordes vocales. J’ai même eu besoin de l’aide d’une orthophoniste, car la première semaine je suis devenue très enrouée », raconte-t-elle.
Avec plus de quarante ans d’expérience, Rosana cumule des rôles marquants dans des feuilletons tels que A Sucessora, Nina, Ti Ti Ti ou encore Segundo Sol, et elle a brillé dans des productions théâtrales comme Dogville, My Fair Lady, Bibi – Uma Vida em Musical et la comédie de longue durée Trair e Coçar É Só Começar. Au cinéma, elle est apparue dans O Coronel e o Lobisomem et Sonhos de um Sonhador, et attend la sortie de Réquiem para Dona Benta en 2026. Son rôle de productrice culturelle complète ce profil multiple et toujours en mouvement.
Sur la scène de Beetlejuice, elle retrouve de vieux partenaires comme le metteur en scène Tadeu Aguiar et partage la scène avec Eduardo Sterblitch, qu’elle décrit comme « un collègue généreux, doté d’un humour affûté et d’une intelligence scénique admirable ».
Pour Rosana, participer à une comédie musicale de cette envergure est aussi un exercice de remise en question et de croissance : « Je plaisante souvent en disant que je suis “prêtée” aux comédies musicales, car je viens du théâtre plus classique, le “teatrão”. Mais chaque projet est un nouvel engagement. Beetlejuice contribue profondément à ma croissance en tant qu’artiste. C’est un honneur de faire partie de cette production. »
Et elle conclut par une invitation qui ressemble à une promesse : « Préparez-vous pour un voyage digne d’un “flash” de l’au-delà ! Laissez vos préjugés à la porte et venez vous perdre dans les rires et l’absurde. Après la dernière scène, vous sortirez si léger que vous envisagerez peut-être la vie éternelle. »
Plus qu’incarner Juno, Rosana Penna réaffirme sa singularité : celle d’une artiste qui ne se contente pas de jouer des personnages, mais qui transforme chaque rôle en reflet de sa propre passion pour l’art.
Rosana Penna : une trajectoire unique qui trouve dans Beetlejuice un nouvel éclat